LES 7 MERCENAIRES DE MERZOUGA
En ce blême petit matin du 1er mai 2018, sur un parking d'une banlieue sordide de MARRAKECH,
7 vieux chevaux de retour s'apprêtent à écumer les hautes vallées de l'ATLAS jusqu'aux confins du désert.
BEBERT"la saumure"
JACKY "papy flingueur"
JO "l'empoisonneur"
NONO "belle gueule"
RAYMOND"la science"
SERGE"le gabelou"
TI OUI"le tondu"
Voici le récit de cette incroyable aventure aux limites de l'impossible,d'après le témoignage de l'un des participants qui souhaite préserver son anonymat de peur de représailles.
Nous péciserons cependant, qu'il s'agit d'un individu d'assez petite taille, possédant un accent de BAB EL OUED assez prononcé et dont des lunettes années fin 70, à la Mourousi, cachent un regard fuyant pour ne pas dire "faux derche".
1er MAI 2018 MARRAKECH VALLEE D'AÏT BOUGUEMEZ
Dernières vérifications des niveaux par notre spécialiste RAYMOND "la science".
Joel vérifie le niveau d'essence!
mais il n' a pas l'expertise de RAYMOND
BEBERT "la saumure"
sur le pont naturel d'IFNI,
suggère de se restaurer à DEMNATE.
SERGE n'a pas très faim....La faute à un oeuf dur pas très frais, semble-t-il.
Nous commençons à aborder l'ATLAS, d'abord par la vallée d'AÏT BOUOULI.
L' érosion balafre cruellement les villages de terre rouge et les terrasses vert émeraude.
Nous montons en altitude et la neige est encore présente en ce début mai.
Nous arrivons enfin dans un petit village près de TRABENT dans la vallée des AÏT BOUGUEMEZ (aït signifiant tribu).
Nous nous installons à l'auberge du M'GOUN ( du nom du 3ème sommet du Maroc qui nous surplombe de ses 4000 mètres).
TI OUI "le tondu" propose une sortie culturelle
pour visiter le petit musée local dans l'irgherm
(ou agadir ou grenier fortifié) qui domine le village
du haut de son sommet pyramidal.
Mais pour Joel, c'est soir de coupe d'europe et nous finissons la soirée dans un café bondé et enfumé du village.
2 MAI 2018 VALLEE D'AÏT BOUGUEMEZ BIN EL OUIDANE
La nuit a été fraîche (nous sommes à 1750m).
Nous partons à la recherche de YOUSSEF et de son association TARAWA.
Nous remontons la vallée, jusqu'au petit village de R'BAT
Devant la petite école maternelle du village, nous retrouvons YOUSSEF qui nous indique la direction du collège.
C'est jounée porte ouverte au collège,
les élèves présentent une exposition
sur la pollution et le recyclage des déchets.
Nous avons apporté des founitures scolaires utiles dans ces vallées reculées où l'approvisionnement est difficile
Après la vallée, la piste monte vers les sommets enneigés.
Jusqu'à un col situé à 2770m d'altitude.
Nous descendons vers ZAOUIAT AHANSAL.
Le paysage change, les belles pierres de la région ont remplacé le pisé.
La végétation se pare de ses plus belles nuances, devient plus méditerranéenne. Et bientôt nous découvrons au loin la spectaculaire cathédrale de rocher
NONO "belle gueule" et BEBERT "la saumure"
anciens prêtres défroqués, en quête de rédemption,
suggèrent de nous agenouiller
devant cette merveille de la nature
et de faire une petite pause prière.
Malheureusement, point d'estaminet accueillant dans les environs. Nous devrons donc nous passer d'une pression bien fraîche
Les 12 coups de midi approchent.
BEBERT a repéré un petit restaurant
au pied de la "cathédrale".
SERGE appuie avec enthousiasme
sa proposition, y voyant
une solution provisoire
à ses petits soucis gastriques.
Nous reprenons la piste. Les grosses cylindrées toisent dédaigneusement
les 2CV berbères.
Nous franchissons plusieurs oueds,
secs habituellement à cette période de l'année.
L'eau dévale de la montagne
après les derniers orages.
JO immortalise ces instants, sous nos regards rigolards,
n'ayant pas anticipé son retour à la voiture.
SERGE "le gabelou", spécialiste des plantes médicinales
alors qu'il était douanier dans le rif,
fait une récolte, de thym sauvage.
"Mais non! Ce n'est pas du thym, bande de prop'à rien"
nous dit-il. "C'est du couscouil, ça pousse partout dans le bled.
C'est bon, pour ce que j'ai!"
JO "l'empoisonneur" confirme doctement, qu'outre ses vertus médicinales,
le couscouil est utilisé en cuisine pour ses qualités gustatives.
Par une belle route goudronnée,
nous devalons vers notre hôtel du lac BIN EL OUIDANE.
Pour fêter dignement notre arrivée,
JO nous a préparé une petite infusion de couscouil,
que nous dégustons dans la chambre de BEBERT.
Le couscouil a une saveur légèrement anisée.
Effectivement, BEBERT nous fait gentiment
remarquer que sa chambre sent un peu l'absynthe.
JACKY "le papy flingueur" a apprécié
la sortie culturelle de la veille.
Il propose donc à JO d'organiser le match retour.
3 MAI 2018 BIN EL OUIDANE IMILCHIL par L'ASSIF MELLOUL
Sur la route de l'ASSIF MELLOUL,
nous faisons un détour pour distribuer
le restant de cahiers, stylos
dans une petite école isolée qui reçoit
épisodiquement des enfants de nomades.
Les conditions de vie sont difficiles, dans le froid et l'isolement.
L'ASSIF MELLOUL est une gorge encaissée entre de hautes falaises. L'oued MELLOUL est gonflé de l'eau de la fonte des neiges.
La piste est difficile, étroite
et pourtant fréquentée.
Nous envoyons quelques éclaireurs téméraires,
tester les passages délicats,
RAYMOND "la science" en expert technique,
SERGE pour étalonner la profondeur de l'oued
(le niveau d'eau est supérieur à 1m50, si on n'aperçoit plus les cheveux).
A AMERGUI, les gorges s'élargissent.
Les nomades de la région convergent vers le spectaculaire marché coloré du village.
Du haut du minaret, l'appel à la prière nous rappelle qu'il est midi.
Aussitôt BEBERT suivant le fumet alléchant des brochettes,
nous conduit au coeur du marché.
nous nous contenterons
de quelques fruits.
JO, flairant un filon prometteur, s'est associé avec SERGE,
pour monter une petite affaire de vente ambulante de gâteaux au couscouil.
SERGE s'occupera de la confection et la vente; JO, moyennant un subtentiel pourcentage, prend en charge le marketing.
Nous sommes les premiers à tester ces délices.
Les effets secondaires sont divers, selon les individus.
La route, goudronnée à présent, monte vers le haut plateau d'IMILCHIL,
dans des conditions dantesques (pluie et neige mélées)
A IMILCHIL, dans l'auberge CHEZ BASSOU,
nous nous réchauffons autour du poële
et d'une bonne infusion de couscouil.
4 MAI 2018 IMILCHIL ER RACHIDIA
La nuit a été très froide.
IMILCHIL est quand même perché à 2200m d'altitude.
Les paysages enneigés sont fabuleux.
Nous abandonnons le projet de passer par le cirque de JAFFAR:
les oueds dans les gorges sont devenus des torrents et la piste boueuse, glissante, dangereuse.
Une superbe route goudronnée nous ménera jusqu'à RICH, puis ERRACHIDIA.
Par une vallée verdoyante, la route serpente, suivant l'oued chargé d'alluvions fertiles.
Nous donnons un peu d'eau à des paysannes qui remontent au village, lourdement chargées de fourrage.
BEBERT intercepte de justesse les gateaux au couscouil que JO s'apprètait à leur offrir.
A mesure que nous descendons vers RICH, le paysage change, devient plus rocailleux; la température remonte
et l'estomac de BEBERT émet des gargouillements.
A RICH, nous mangeons un délicieux tagine pour seulement 20DH.
Sur une superbe route nationale, nous filons vers ER RACHIDIA.
NONO "belle gueule", se souvenant de sa jeunesse folle au sein du gang des tractions avant, appuie sur le champignon.
Un peu trop,
peut-être....
Son épagneul breton, pris en falgrant délit sur le canapé du salon, ne ferait pas une autre tête.
Nous essayons de négocier, en suggérant subtilement
que "peut-être, nous n'avons pas besoin de reçu".
Le regard sévère et la réponse ferme de l'incorruptible, nous dissuade de pousser plus avant les négociations.
NONO boude un peu, mais fini par être convaincu par JACKY "le papy flingueur"
de prendre sa léçon de nage à l'indienne.
La journée se termine, dans la bonne humeur, sur une partie de boules.
Au terme d'un suspense insoutenable, les rose et fuschia de BEBERT, dans une forme époustouflante, atomise l'équipe de SERGE, diminué par ses récents soucis de santé.
Une réclamation est déposée par SERGE, envers JO l'arbitre de la rencontre, pour corruption.
5 MAI 2018 ER RACHIDIA MERZOUGA
SERGE est ravi de son achat de la veille: un flacon d'huile essentielle d'eucalyptus, dont il s'asperge généreusement.
Aujourd'hui, nous avons prévu un pique nique.
Aussi, faisons nous une halte au supermarché.
Une capiteuse effluve d'eucalyptus envahit le parking du supermarché, lorsque SERGE ouvre la portière.
Nous laissons la route nationale, pour suivre la fraîche vallée du ZIZ et ses villages magnifiques.
paisiblement, sereinement.
Nous nous arrêtons au bord de la rivière.
L'endroit est calme et frais,
parfait pour notre pique nique.
Les vieux boucaniers, en bons chasseurs,
s'occupent du feu et de la cuisson des côtes d'agneau,
tandis que JACKY
s'occupe des
produits locaux.
Nous poursuivons notre route, sous une chaleur de plus en plus accablante, vers le sud, le désert.
La piste, parfois se dérobe à nos yeux; RAYMOND se fait plaisir au volant.
Enfin, apparaît notre hôtel, au coeur des dunes de l'erg CHEBBI.
6 MAI 2018 MERZOUGA BIVOUAC DANS L'ERG CHEBBI
Dès le matin, les couleurs des dunes sont féeriques,
changeant à chaque instant de la journée.
Nous sommes tous, hypnotisés par la beauté du spectacle.
Nos yeux emerveillés suivent les voluptueuses courbes
des dunes de l'erg CHEBBI et
se perdent dans le vague de l'horizon, blanc d'une chaleur torride.
Le vent chaud du sahara frôle nos visages hâlés de sa caresse sensuelle,
faisant frissonner les chevelures ébouriffées des hautes herbes.
Les 7 compères restent bouche bée, devant les merveilles
que Dame Nature leur offre.
Aussi, nous grimons nous habilement,
afin de nous mêler à la la population locale.
BEBERT, l'oeil pétillant de malice ("ah! le pétillant!)
engage la conversation:
"les voyages forment la jeunesse, mesdemoiselles;
ça vous interesse la magie d'Istambul, l'Egypte,
Bangkok, l'Amérique du sud?"
SERGE, contre toute attente, cachant son visage ingrat sous un chèche et empestant l'eucalyptus à 1km, est le seul à ne pas rentrer bredouille.
"Eh oui! bande de prop'à rien!
C'est le charme de l'accent de BAB EL OUED,
la t'chatche, quoi!"
NONO, JACKY et BEBERT partent surfer
en 4x4, dans les dunes
En visitant RISSANI, nous rencontrons un habitant de MERZOUGA
qui nous fait découvrir les richesses architecturales des environs.
Il nous dit souffrir depuis plusieurs années de l'estomac. BEBERT et NONO établissent un diagnostic et JO prescrit, outre des infusions de couscouil une liste de médicaments adaptés.
Il refuse qu'on lui paye ses médicaments
et nous invite chez lui, faire connaissance avec sa famille.
C'est l'heure de se rendre au bivouac.
2 heures de dromadaires nous attendent.
Certains dromadaires, par leur sourire narquois, semblent même vouloir se moquer de leur curieux bédouin.
2 heures d'une splendide méharée, dans le soleil couchant incendiant le paysage,
avant d'arriver, enfin à notre destination,
les fesses endolories, le dos en compote.
L'atterrissage est un peu chaotique....
Nous nous retrouvons tous fourbus mais contents autour d'une petite infusion,
chacun faisant partager des blagues de plus ou moins bon goût.
7 MAI 2018 MERZOUGA TINEGHIR
Au petit matin, nous nous précipitons en haut des dunes,
pour assister au lever du soleil.
Chacun est muet d'admiration,
nous ne nous en plaindrons pas.
Mais il est l'heure de quitter ce spectacle enchanteur. 2 heures de dromadaires sont nécessaires pour retourner à l'hôtel.
BEBERT proteste: "on n'arrivera pas pour le déjeuner!"
SERGE boude et veut rentrer à pied.
JACKY pretexte le "mal du cycliste".
NONO précise:
"On peut constater parfois, l’apparition de grosseurs cutanées surnommées, «troisième testicule du sportif»."
BEBERT surenchérit:
"Si tu as 4 testicules, ne te gonfles pas d'orgueil....."
JO l'interrompt juste à temps:
"Le couscouil peut aussi être appliqué sous forme de pommade".
Sur les conseils de BEBERT.
Nous nous arrêtons à l'Etoile du Sud,
les meilleures frites
du Maroc, soutient-il.
D'Alnif, le patron du restaurant nous conseille une piste, à travers le Djebel SAGHO, pour rejoindre TINEGHIR.
Nous progressons dans un monde
de plus en plus minéral.
La piste se durcit,
jusqu'à devenir
impraticable
pour nos 4x4.
Un couple de nomades nous aide,
mais nous indique que
nous ne pourrons pas continuer.
Pour les remercier, nous leur donnons de la farine et de l'huile,
denrées précieuses à 60 km de tout village.
Effectivement, au sommet d'un col,
la piste s'interrompt brutalement.
Nous reprenons
le même chemin
en sens inverse,
jusqu'à Alnif.
Une superbe route goudronnée nous conduit en 1 heure à TINEGHIR, début des gorges du TODHRA.
Nous logeons dans un hôtel troglodythe, au fond des gorges.
Mais, que peut bien évaluer RAYMOND"la science"?
Sa dernière truite pêchée dans le Scorf? La longueur du dernier put raté par JACKY? La chance insolente de JO au barbu? la taille de GASPARD, le petit fils de SERGE et JO?
Mais non! bande de prop'à rien,
c'est le diamètre de ce magnifique melon de TINEGHIR.
8 MAI 2018 TINEGHIR SKOURA
Ce matin, RAYMOND a emprunté un peu
d'huile essentielle d'eucalyptus à SERGE.
Les effets se font immédiatement sentir.
Un pneu sur un véhicule
se dégonfle progressivement.
Nous retournons à TINEGHIR pour réparer.
JACKY souffre toujours
de son 3ème testicule.
Fermement, il en fait part
à NONO qui consulte illico
son VIDAL de poche.
Soudain,
LE COUP DE FOUDRE!
Aussitôt, un goûter
de fiançailles est organisé.
Des projets s'échafaudent fébrilement.
Un garage au bord d'une nationale fréquentée.
Une petite affaire de taxis locaux.
Et pourquoi pas, une société de transport international?
Nous prenons ensuite, la direction des gorges du TODHRA, dont le canyon entaille le plateau sur plusieurs centaines de profondeur.
A la sortie de TAMTATOUTCHE, une bonne piste monte régulièrement rejoignant les gorges du DADES.
Les enfants nomades font semblant
de dégager des pierres devant nous sur la route,
quémandant des stylos, des dirhams.
Les conditions de vie sont précaires.
Du col situé à 2700m d'altitude, nous basculons vers MSEMRIR,
empruntant un oued qui commence à ruisseler.
Le ciel se charge de nuages d'orage menaçants.
Les gorges du DADES, pour spectaculaires qu'elles soient, ont perdu leurs couleurs éclatantes sous la pluie qui commence à tomber.
Tard dans la soirée, alors que le soleil est revenu dans la plaine de SKOURA,
nous rejoignons notre hôtel dans la palmeraie, hâvre de paix et de méditation.
JACKY va mieux; il peut maintenant s'asseoir.
Ses relations avec NONO se sont donc adoucies.
NONO, toujours prosélyte, en a profité pour l'évangéliser et lui faire expier ses écarts passés. Touché par le grâce, on le voit ici réciter le benedicite sous l'oeil goguenard de ce mécréant de SERGE.
9 mai 2018 SKOURA MARRAKECH
Branle bas de combat ce matin: il est 6H du matin, tout le monde se lève en urgence en voyant passer SERGE avec sa valise.
Lui, qui d'habitude est toujours le dernier debout, est prêt à partir.
Simple erreur de manipulation de son vieux réveil, relique d'une de ses dernières opérations de saisie d'un cargo philippin dans le port de TANGER.
Nous prenons donc notre temps pour visiter AÏT BENHADDOU, sous la lumière du matin.
se moque
de ses petits camarades.
Par la vallée colorée de l'OUNILA et ses kasbahs,
nous nous dirigeons vers le col de TIZI N'TEST.
Après le col, nous descendons vers marrakech.
Le ciel se couvre une fois de plus.
Nous arrivons à marrakech au milieu des travaux et sous un ciel menaçant.
A l'issue de cette glorieuse épopée, nous avons tous changé profondément.
BEBERT"la saumure"
se consacre à
l'écriture d'un guide
gastronomique et oenologique
des "petits bouibouis"
du Haut Atlas.
a ouvert un salon
de coiffure au marché
de TAMMEMELT,
juste à côté du
tondeur de moutons
maintenant une auto école
spécialisée dans la récupération
des points de permis de chauffards
en excès de vitesse.
est resté à SKOURA,
en séminaire de méditation
avec de joyeux compagnons,
rencontrés à l'hôtel Samara.
RAYMOND"la science"
pense agrandir
et transformer son garage
en concession DACIA.
a créé une
multinationale, spécialisée
dans les produits dérivés
du couscouil.
SERGE"le gabelou" a renoué
avec ses anciens contacts,
agriculteurs dans le RIF
pour les persuader d'abandonner
la culture du canabis, au profit de
celle, plus lucrative, du couscouil.
De surcroît, hélas, ils ont décidé
de s'occuper conjointement de l'éducation leur petit fils.